© 2019 Editions Schortgen
Extraits avec l'autorisation de l'éditeur
PROFIL
Marie-Providence Seminega Umutoni
Survivante tutsi
L’aînée de Tharcisse et Chantal
Âgée de 15 ans pendant le génocide
Change d'école à cause du harcèlement
Née au Rwanda, Marie déménage en France avec sa famille à l'âge de cinq ans. Jusque-là elle ne connaît pas la différence entre Hutu et Tutsi.
L’INNOCENCE PERDUE
Lorsque sa famille revient au Rwanda, Marie a neuf ans. Les tensions entre Hutu et Tutsi augmentent. Chaque jour à l'école, son institutrice énumère et compte tous les élèves en fonction de leur appartenance ethnique. Tous les enfants savent qu'ils ne doivent pas se regarder pendant l'appel ni parler de leur origine ethnique. Pour échapper au harcèlement quotidien que subissent les élèves tutsi, les parents de Marie l'inscrivent dans une école belge internationale où on ne tient pas compte de l'appartenance ethnique. L'innocence qu'elle connaissait en France disparaît.
HANTÉE PAR LA PEUR DE LA MORT
Lorsque l'avion qui transporte les présidents du Burundi et du Rwanda est abattu, Marie sait dans son cœur que quelque chose de grave va arriver. Mais elle ne pense pas que la situation va les toucher directement, elle et sa famille. Ce sentiment change avec le temps alors qu’ils continuent d'entendre parler de familles tutsi qui sont tuées dans la capitale. Marie commence à s’imaginer qu’elle va se faire tuer pour le simple fait qu'elle est Tutsi. Elle est hantée par la peur de la mort.
L'ÉVASION
Le 21 avril 1994, Marie et sa famille passent la journée à tourner en rond à la recherche d’un moyen de s'échapper, quel qu’il soit. La situation semble totalement désespérée, mais tout à coup quelqu’un frappe à la porte. Adolphe arrive à l’improviste. Il organise rapidement un plan de sauvetage selon lequel la famille doit quitter immédiatement son domicile. Marie suit vite les instructions de sa mère en enfilant deux pantalons. Cela rendra les choses plus difficiles si quelqu'un tente de la violer. Elle prend une veste à capuchon et son inhalateur contre l’asthme. Quand ils quittent la maison, Marie part avec ses parents et deux de ses frères et sœurs. Deux de ses jeunes frères et sœurs vont avec Adolphe, ce qui attriste Marie car sa famille n'a jamais été séparée.
Le lendemain, alors qu'elle et sa famille se cachent dans un buisson de roseaux, leur ami Justin lance à haute voix des mots tels que “ courage, ” “ patience ” et “ endurance. ” Cela lui donne la force de continuer.
MORTE À L’INTÉrieur
Pendant que Marie et sa famille se cachent dans la cabane à chèvres, l’espace devient comme une tombe. Elle a l'impression qu'ils sont en train de pourrir à cause de l'air vicié, des odeurs dégoûtantes et des poux. Ils doivent tous utiliser un petit seau pour aller aux toilettes. Marie lutte contre des sentiments de frustration, d'humiliation et un manque d’estime de soi. Elle se sent morte à l'intérieur.
De l'intérieur de la cabane, Marie peut entendre les tueurs se vanter d'avoir violé et tué des femmes tutsi. Les cris effrayants de ceux qui sont en train de mourir la font sentir vulnérable et terrifiée.
N'OUBLIE JAMAIS
Marie se souvient toujours du 5 juillet 1994, le jour où elle et sa famille sont sauvées de la pièce souterraine. Elle n'a que la peau sur les os et se sent humiliée et blessée. Elle a peur des ennemis qui rôdent toujours et seraient prêts à reprendre le massacre si on leur en donnait l'occasion.
De retour chez eux à Butare, les mauvais souvenirs les empêchent d’y rester. Tout ainsi que tout le monde a disparu, y compris tous leurs amis, leurs voisins et leurs proches tutsi.
Bien que ce soit déchirant de se souvenir de ce qui lui est arrivée, à elle et à sa famille, Marie se sentirait coupable si elle oubliait. Elle s'engage à ne plus jamais permettre qu'une telle chose se reproduise dans sa vie.
Aujourd’hui, Marie vit en Suisse avec son mari et son fils.